شعر فرانسوی

Mʀ Yᴀsɪɴ

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Celui-là sur l’airain a gravé sa pensée ;
Dans un rythme doré l’autre l’a cadencée ;
Du moment qu’on l’écoute, on lui devient ami.
Sur sa toile, en mourant, Raphaël l’a laissée,
Et, pour que le néant ne touche point à lui,
C’est assez d’un enfant sur sa mère endormi.
 

Mʀ Yᴀsɪɴ

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Comme dans une lampe une flamme fidèle,
Au fond du Parthénon le marbre inhabité
Garde de Phidias la mémoire éternelle,
Et la jeune Vénus, fille de Praxitèle,
Sourit encor, debout dans sa divinité,
Aux siècles impuissants qu’a vaincus sa beauté.
 

Mʀ Yᴀsɪɴ

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Recevant d’âge en âge une nouvelle vie,
Ainsi s’en vont à Dieu les gloires d’autrefois ;
Ainsi le vaste écho de la voix du génie
Devient du genre humain l’universelle voix…
Et de toi, morte hier, de toi, pauvre Marie,
Au fond d’une chapelle il nous reste une croix !
 

Mʀ Yᴀsɪɴ

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ne croix ! et l’oubli, la nuit et le silence !
Écoutez ! c’est le vent, c’est l’Océan immense ;
C’est un pêcheur qui chante au bord du grand chemin.
Et de tant de beauté, de gloire et d’espérance,
De tant d’accords si doux d’un instrument divin,
Pas un faible soupir, pas un écho lointain !
 

Mʀ Yᴀsɪɴ

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Une croix ! et ton nom écrit sur une pierre,
Non pas même le tien, mais celui d’un époux,
Voilà ce qu’après toi tu laisses sur la terre ;
Et ceux qui t’iront voir à ta maison dernière,
N’y trouvant pas ce nom qui fut aimé de nous,
Ne sauront pour prier où poser les genoux.
 

Mʀ Yᴀsɪɴ

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Ô Ninette ! où sont-ils, belle muse adorée,
Ces accents pleins d’amour, de charme et de terreur,
Qui voltigeaient le soir sur ta lèvre inspirée,
Comme un parfum léger sur l’aubépine en fleur ?
Où vibre maintenant cette voix éplorée,
Cette harpe vivante attachée à ton coeur ?
 

Mʀ Yᴀsɪɴ

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N’était-ce pas hier, fille joyeuse et folle,
Que ta verve railleuse animait Corilla,
Et que tu nous lançais avec la Rosina
La roulade amoureuse et l’oeillade espagnole ?
Ces pleurs sur tes bras nus, quand tu chantais le Saule,
N’était-ce pas hier, pâle Desdemona ?
 

Mʀ Yᴀsɪɴ

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N’était-ce pas hier qu’à la fleur de ton âge
Tu traversais l’Europe, une lyre à la main ;
Dans la mer, en riant, te jetant à la nage,
Chantant la tarentelle au ciel napolitain,
Coeur d’ange et de lion, libre oiseau de passage,
Espiègle enfant ce soir, sainte artiste demain ?
 

Mʀ Yᴀsɪɴ

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N’était-ce pas hier qu’enivrée et bénie
Tu traînais à ton char un peuple transporté,
Et que Londre et Madrid, la France et l’Italie,
Apportaient à tes pieds cet or tant convoité,
Cet or deux fois sacré qui payait ton génie,
Et qu’à tes pieds souvent laissa ta charité ?
 

Mʀ Yᴀsɪɴ

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Qu’as-tu fait pour mourir, ô noble créature,
Belle image de Dieu, qui donnais en chemin
Au riche un peu de joie, au malheureux du pain ?
Ah ! qui donc frappe ainsi dans la mère nature,
Et quel faucheur aveugle, affamé de pâture,
Sur les meilleurs de nous ose porter la main ?
 

Mʀ Yᴀsɪɴ

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Ne suffit-il donc pas à l’ange de ténèbres
Qu’à peine de ce temps il nous reste un grand nom ?
Que Géricault, Cuvier, Schiller, Goethe et Byron
Soient endormis d’hier sous les dalles funèbres,
Et que nous ayons vu tant d’autres morts célèbres
Dans l’abîme entr’ouvert suivre Napoléon ?
 

Mʀ Yᴀsɪɴ

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Chevaux de bois


Tournez, tournez, bons chevaux de bois,
Tournez cent tours, tournez mille tours,
Tournez souvent et tournez toujours,
Tournez, tournez au son des hautbois.

Le gros soldat, la plus grosse bonne
Sont sur vos dos comme dans leur chambre,
Car en ce jour au bois de la Cambre
Les maîtres sont tous deux en personne.

Tournez, tournez, chevaux de leur coeur,
Tandis qu’autour de tous vos tournois
Clignote l’oeil du filou sournois,
Tournez au son du piston vainqueur.

C’est ravissant comme ça vous soûle
D’aller ainsi dans ce cirque bête :
Bien dans le ventre et mal dans la tête,
Du mal en masse et du bien en foule.

Tournez, tournez sans qu’il soit besoin
D’user jamais de nuls éperons
Pour commander à vos galops ronds,
Tournez, tournez, sans espoir de foin

Et dépêchez, chevaux de leur âme :
Déjà voici que la nuit qui tombe
Va réunir pigeon et colombe
Loin de la foire et loin de madame.

Tournez, tournez ! le ciel en velours
D’astres en or se vête lentement.
Voici partir l’amante et l’amant.
Tournez au son joyeux des tambours !
 

Mʀ Yᴀsɪɴ

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Lueur en pleine nuit


Es tu le mirage qui tracerait le sourire sur mon visage ?
Le lustre étincelant, l’éclaireur de mon obscur paysage ?
Griserais-tu mon cœur ? Le prendrais-tu en otage ?
Haverais-tu ton nom tout au long de son rivage…
Altère mon destin si tu n’y appartiens point
L’aube sans soleil prendrait certainement fin
Invente nous une histoire, écris la avec ardeur
Sème-y des germes d’amour et de bonheur
Assurons-les, on va certes les cueillir
Qu’elles soient garnies de respect, gaieté et de plaisirs
Orné de tous ces hommes, à mes yeux tu es roi
Ultime joyau entouré de drap de soie
Bienveillante à mon altesse ainsi je serais
Inondée d’amour et de tendresse à toi seul je les offrirais
 

Mʀ Yᴀsɪɴ

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Mʀ Yᴀsɪɴ

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Autre (Impression fausse)


La cour se fleurit de souci
Comme le front
De tous ceux-ci
Qui vont en rond
En flageolant sur leur fémur
Débilité
Le long du mur
Fou de clarté.

Tournez, Samsons sans Dalila,
Sans Philistin,
Tournez bien la
Meule au destin.
Vaincu risible de la loi,
Mouds tour à tour
Ton coeur, ta foi
Et ton amour !

Ils vont ! et leurs pauvres souliers
Font un bruit sec,
Humiliés,
La pipe au bec.
Pas un mot ou bien le cachot
Pas un soupir,
Il fait si chaud
Qu’on croit mourir.

J’en suis de ce cirque effaré,
Soumis d’ailleurs
Et préparé
A tous malheurs.
Et pourquoi si j’ai contristé
Ton voeu têtu,
Société,
Me choierais-tu ?

Allons, frères, bons vieux voleurs,
Doux vagabonds,
Filous en fleurs,
Mes chers, mes bons,
Fumons philosophiquement,
Promenons-nous
Paisiblement :
Rien faire est doux.

Paul Verlaine, Parallèlement
 

Mʀ Yᴀsɪɴ

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Au prolétaire


Ô captif innocent qui ne sais pas chanter
Écoute en travaillant tandis que tu te tais
Mêlés aux chocs d’outils les bruits élémentaires
Marquent dans la nature un bon travail austère
L’aquilon juste et pur ou la brise de mai
De la mauvaise usine soufflent la fumée
La terre par amour te nourrit les récoltes
Et l’arbre de science où mûrit la révolte
La mer et ses nénies dorlotent tes noyés
Et le feu le vrai feu l’étoile émerveillée
Brille pour toi la nuit comme un espoir tacite
Enchantant jusqu’au jour les bleuités du site
Où pour le pain quotidien peinent les gars
D’ahans n’ayant qu’un son le grave l’oméga

Ne coûte pas plus cher la clarté des étoiles
Que ton sang et ta vie prolétaire et tes moelles
Tu enfantes toujours de tes reins vigoureux
Des fils qui sont des dieux calmes et malheureux
Des douleurs de demain tes filles sont enceintes
Et laides de travail tes femmes sont des saintes
Honteuses de leurs mains vaines de leur chair nue
Tes pucelles voudraient un doux luxe ingénu
Qui vînt de mains gantées plus blanches que les leurs
Et s’en vont tout en joie un soir à la male heure
Or tu sais que c’est toi toi qui fis la beauté
Qui nourris les humains des injustes cités
Et tu songes parfois aux alcôves divines
Quand tu es triste et las le jour au fond des mines
 

Mʀ Yᴀsɪɴ

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A ce Printemps perdu


A ce Printemps perdu
où nous nous sommes aimés
au bord de la rivière
un jour du mois de Mai

A ce Printemps perdu
où l’on sent le bonheur
quitter cette espérance
qu’on laisse et ne voit plus

A ce Printemps perdu
et à la renaissance
d’une passion si belle
Vie qui n’existe plus

A ce Printemps perdu
et aux charmants oiseaux
et à ces chants d’idylles
belles, mises à nu

A ce Printemps perdu
Comme un beau violon
aux cordes abimées
Qu’on n’entendra plus jamais

A ce Printemps perdu
et à ces vieilles pierres
un jour au coeur des vignes
qui ne seront plus là
 

Mʀ Yᴀsɪɴ

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À Samuel Bernard


(Au nom de Madame de Fontaine-Martel.)

C’est mercredi que je soupais chez vous
Et que, sortant des plaisirs de la table,
Bientôt couchée, un sommeil prompt et doux
Me fit présent d’un songe délectable.

Je rêvais donc qu’au manoir ténébreux
J’étais tombée, et que Pluton lui-même
Me menait voir les héros bienheureux
Dans un séjour d’une beauté suprême ;
Par escadrons ils étaient séparés ;
L’un après l’autre il me les fit connaître.
Je vis d’abord modestement parés
Les opulents qui méritaient de l’être :
Voilà, dit-il, les généreux amis ;
En petit nombre ils viennent me surprendre ;
Entre leurs mains les biens ne semblaient mis
Que pour avoir le soin de les répandre.
Ici sont ceux dont les puissants ressorts,
Crédit immense, et sagesse profonde,
Ont soutenu l’état par des efforts
Qui leur livraient tous les trésors du monde.
Un peu plus loin, sur ces riants gazons,
Sont les héros pleins d’un heureux délire,
Qu’Amour lui-même en toutes les saisons
Fit triompher dans son aimable empire.
Ce beau réduit, par préférence, est fait
Pour les vieillards dont l’humeur gaie et tendre
Paraît encore avoir ses dents de lait,
Dont l’enjouement ne saurait se comprendre.
D’un seul regard tu peux voir tout d’un coup
Le sort des bons, les vertus couronnées :
Mais un mortel m’embarrasse beaucoup ;
Ainsi je veux redoubler ses années :
Chaque escadron le revendiquerait.
La jalousie au repos est funeste :
Venant ici quel trouble il causerait !
Il est là-haut très heureux ; qu’il y reste.
 

Mʀ Yᴀsɪɴ

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En bateau


L’étoile du berger tremblote
Dans l’eau plus noire et le pilote
Cherche un briquet dans sa culotte.

C’est l’instant, Messieurs, ou jamais,
D’être audacieux, et je mets
Mes deux mains partout désormais !

Le chevalier Atys, qui gratte
Sa guitare, à Chloris l’ingrate
Lance une oeillade scélérate.

L’abbé confesse bas Eglé,
Et ce vicomte déréglé
Des champs donne à son coeur la clé.

Cependant la lune se lève
Et l’esquif en sa course brève
File gaîment sur l’eau qui rêve.

Paul Verlaine
 

Mʀ Yᴀsɪɴ

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L’école


Les p’tiots matineux sont ‘jà par les ch’mins
Et, dans leu’ malett’ de grousse touél’ blue
Qui danse et berlance en leu’ tapant l’cul,
I’s portent des liv’s à coûté d’leu pain.

L’matin est joli coumm’ trent’-six sourires,
Le souleil est doux coumm’ les yeux des bêtes…
La vie ouvre aux p’tiots son grand liv’ sans lett’es
Oùsqu’on peut apprend’ sans la pein’ de lire :
Ah ! les pauv’s ch’tiots liv’s que ceuss’ des malettes !

La mouésson est mûre et les blés sont blonds ;
I’ s’ pench’nt vars la terr’ coumm’ les tâcherons .
Qui les ont fait v’ni’ et les abattront :
Ça sent la galette au fournil des riches
Et, su’la rout’, pass’nt des tireux d’pieds d’biche.
Les chiens d’ deux troupets qui vont aux pâtis,
Les moutons itou et les mé’s barbis
Fray’nt et s’ent’erlich’nt au long des brémailles
Malgré qu’les bargers se soyin bouquis
Un souér d’assemblé’, pour eune garçaille.
Dans les ha’s d’aubier qu’en sont ros’s et blanches,
Les moignieaux s’accoupl’nt, à tout bout de branches,
Sans s’douter qu’les houmm’s se mari’nt d’vant l’maire,
Et i’s s’égosill’nt à quérrier aux drôles
L’Amour que l’on r’jitt’ des liv’s’de l’école
Quasi coumme eun’ chous’ qui s’rait pas à faire.
A l’oré’ du boués, i’ s’trouve eun’ grand crouéx,
Mais les peupéiers sont pus grands dans l’boués.
L’fosséyeux encave un mort sous eun’ pierre,
On baptise au bourg : les cloches sont claires
Et les vign’s pouss’ vart’s, sur l’ancien cim’tiére !

Ah ! Les pauv’s ch’tiots liv’s que ceuss’ des malettes !
Sont s’ment pas foutus d’vous entrer en tète
Et, dans c’ti qu’est là, y a d’quoué s’empli l’coeur !
A s’en empli l’coeur, on d’vienrait des hoummes,
Ou méchants ou bons - n’importe ben coumme! -
Mais, vrais coumm’ la terre en friche ou en fleurs,
L’souleil qui fait viv’e ou la foud’ qui tue.
Et francs, aussi francs que la franch’ Nature,
Les p’tiots ont marché d’leu’s p’tit’s patt’s, si ben
Qu’au-d’ssus des lopins de seigle et d’luzarne,
Gris’ coumme eun’ prison, haut’ coumme eun’ casarne
L’Ecole est d’vant eux qui leu’ bouch’ le ch’min.

L’mét’ d’école les fait mett’e en rangs d’ougnons
Et vire à leu’têt’ coumme un général :
” En r’tenu’, là-bas !… c’ti qui pivott’ mal !…”
Ça c’est pou’ l’cougner au méquier d’troufion.

On rent’ dans la classe oùsqu’y a pus bon d’Guieu :
On l’a remplacé par la République !
De d’ssus soun estrad’ le met’ leu-z-explique
C’qu’on y a expliqué quand il ‘tait coumme eux.
I’leu’ conte en bieau les tu’ri’s d’ l’Histouére,
Et les p’tiots n’entend’nt que glouère et victouére :
I’ dit que l’travail c’est la libarté,
Que l’Peuple est souv’rain pisqu’i’ peut voter,
Qu’les loués qu’instrument’nt nous bons députés
Sont respectab’s et doiv’nt êt respectées,
Qu’faut payer l’impôt… ” Môssieu, j’ai envie ! …
- Non ! .., pasque ça vous arriv’ trop souvent !”
I veut démontrer par là aux enfants
Qu’y a des régu’s pour tout, mêm’ pou’la vessie
Et qu’i’ faut les suiv’déjà, dret l’école.

I’pétrit à mêm’ les p’tits çarvell’s molles,
I’rabat les fronts têtus d’eun’ calotte,
I’ varse soun’ encr’ su’ les fraîch’s menottes
Et, menteux, fouéreux, au sortu’ d’ses bancs
Les p’tiots sont pus bons qu’â c’qu’i’ les attend:

Ça f’ra des conscrits des jours de r’vision
Traînant leu’ drapieau par tous les bordels,
Des soldats à fout’e aux goul’s des canons
Pour si peu qu’les grous ayin d’la querelle,
Des bûcheux en grippe aux dents des machines,
Des bons citoyens à jugeotte d’ouée :
Pousseux d’bull’tins d’vote et cracheux d’impôts,
Des cocus devant l’Eglise et la Loué
Qui bav’ront aux lév’s des pauv’s gourgandines,
Des hounnètes gens, des gens coumme i’faut
Qui querv’ront, sarrant l’magot d’un bas d’laine,
Sans vouer les étouel’s qui fleuriss’nt au ciel
Et l’Avri’ en fleurs aux quat’ coins d’la plaine !…

Li ! l’vieux met’ d’école, au fin bout d’ses jours
Aura les ch’veux blancs d’un déclin d’âg’ pur ;
I’ s’ra ensarré d’l'estime d’tout l’bourg
Et touch’ra les rent’s du gouvernement…
Le vieux maît’ d’écol’ ne sera pourtant
Qu’un grand malfaiseux devant la Nature !..

Gaston Couté
 

Mʀ Yᴀsɪɴ

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A ce Printemps perdu


A ce Printemps perdu
où nous nous sommes aimés
au bord de la rivière
un jour du mois de Mai

A ce Printemps perdu
où l’on sent le bonheur
quitter cette espérance
qu’on laisse et ne voit plus

A ce Printemps perdu
et à la renaissance
d’une passion si belle
Vie qui n’existe plus

A ce Printemps perdu
et aux charmants oiseaux
et à ces chants d’idylles
belles, mises à nu

A ce Printemps perdu
Comme un beau violon
aux cordes abimées
Qu’on n’entendra plus jamais

A ce Printemps perdu
et à ces vieilles pierres
un jour au coeur des vignes
qui ne seront plus là

Elodie Santos, 2008
 

Mʀ Yᴀsɪɴ

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A la Marquise


Marquise, si mon visage
A quelques traits un peu vieux,
Souvenez-vous qu’à mon âge
Vous ne vaudrez guère mieux.

Le temps aux plus belles choses
Se plaît à faire un affront,
Et saura faner vos roses
Comme il a ridé mon front.

Le même cours des planètes
Règle nos jours et nos nuits
On m’a vu ce que vous êtes;
Vous serez ce que je suis.

Cependant j’ai quelques charmes
Qui sont assez éclatants
Pour n’avoir pas trop d’alarmes
De ces ravages du temps.

Vous en avez qu’on adore;
Mais ceux que vous méprisez
Pourraient bien durer encore
Quand ceux-là seront usés.

Ils pourront sauver la gloire
Des yeux qui me semblent doux,
Et dans mille ans faire croire
Ce qu’il me plaira de vous.

Chez cette race nouvelle,
Où j’aurai quelque crédit,
Vous ne passerez pour belle
Qu’autant que je l’aurai dit.

Pensez-y, belle marquise.
Quoiqu’un grison fasse effroi,
Il vaut bien qu’on le courtise
Quand il est fait comme moi.

Pierre Corneille
 

Mʀ Yᴀsɪɴ

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A Mme du Châtelet


” Si vous voulez que j’aime encore,
Rendez-moi l’âge des amours ;
Au crépuscule de mes jours
Rejoignez, s’il se peut, l’aurore.

Des beaux lieux où le dieu du vin
Avec l’Amour tient son empire,
Le Temps, qui me prend par la main,
M’avertit que je me retire.

De son inflexible rigueur
Tirons au moins quelque avantage.
Qui n’a pas l’esprit de son âge,
De son âge a tout le malheur.

Laissons à la belle jeunesse
Ses folâtres emportements.
Nous ne vivons que deux moments :
Qu’il en soit un pour la sagesse.

Quoi ! pour toujours vous me fuyez,
Tendresse, illusion, folie,
Dons du ciel, qui me consoliez
Des amertumes de la vie !

On meurt deux fois, je le vois bien :
Cesser d’aimer et d’être aimable,
C’est une mort insupportable ;
Cesser de vivre, ce n’est rien. “

Ainsi je déplorais la perte
Des erreurs de mes premiers ans ;
Et mon âme, aux désirs ouverte,
Regrettait ses égarements.

Du ciel alors daignant descendre,
L’Amitié vint à mon secours ;
Elle était peut-être aussi tendre,
Mais moins vive que les Amours.

Touché de sa beauté nouvelle,
Et de sa lumière éclairé,
Je la suivis; mais je pleurai
De ne pouvoir plus suivre qu’elle.

Voltaire (François Marie Arouet)
 

Mʀ Yᴀsɪɴ

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A Mme Lullin


A Mme Lullin

Hé quoi ! vous êtes étonnée
Qu’au bout de quatre-vingts hivers,
Ma Muse faible et surannée
Puisse encor fredonner des vers ?

Quelquefois un peu de verdure
Rit sous les glaçons de nos champs ;
Elle console la nature,
Mais elle sèche en peu de temps.

Un oiseau peut se faire entendre
Après la saison des beaux jours ;
Mais sa voix n’a plus rien de tendre,
Il ne chante plus ses amours.

Ainsi je touche encor ma lyre
Qui n’obéit plus à mes doigts ;
Ainsi j’essaie encor ma voix
Au moment même qu’elle expire.

“Je veux dans mes derniers adieux,
Disait Tibulle à son amante,
Attacher mes yeux sur tes yeux,
Te presser de ma main mourante.”

Mais quand on sent qu’on va passer,
Quand l’âme fuit avec la vie,
A-t-on des yeux pour voir Délie,
Et des mains pour la caresser ?

Dans ce moment chacun oublie
Tout ce qu’il a fait en santé.
Quel mortel s’est jamais flatté
D’un rendez-vous à l’agonie ?

Délie elle-même, à son tour,
S’en va dans la nuit éternelle,
En oubliant qu’elle fut belle,
Et qu’elle a vécu pour l’amour.

Nous naissons, nous vivons, bergère,
Nous mourons sans savoir comment ;
Chacun est parti du néant :
Où va-t-il ?… Dieu le sait, ma chère.

Voltaire (François Marie Arouet)
 

Mʀ Yᴀsɪɴ

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Clarisse


Imitation d’un poète écossais.

Oui, je me plais, Clarisse, à la saison tardive,
Image de cet âge où le temps m’a conduit ;
Du vent à tes foyers j’aime la voix plaintive
Durant la longue nuit.

Philomèle a cherché des climats plus propices ;
Progné fuit à son tour : sans en être attristé,
Des beaux jours près de toi retrouvant les délices,
Ton vieux cygne est resté.

Viens dans ces champs déserts où la bise murmure
Admirer le soleil, qui s’éloigne de nous ;
Viens goûter de ces bois qui perdent leur parure
Le charme triste et doux.

Des feuilles que le vent détache avec ses ailes
Voltige dans les airs le défaillant essaim :
Ah ! puissé-je en mourant me reposer comme elles
Un moment sur ton sein !

Pâle et dernière fleur qui survit à Pomone,
La veilleuse en ces prés peint mon sort et ma foi :
De mes ans écoulés tu fais fleurir l’automne,
Et je veille pour toi.

Ce ruisseau, sous tes pas, cache au sein de la terre
Son cours silencieux et ses flots oubliés :
Que ma vie inconnue, obscure et solitaire,
Ainsi passe à tes pieds !

Aux portes du couchant le ciel se décolore ;
Le jour n’éclaire plus notre aimable entretien :
Mais est-il un sourire aux lèvres de l’Aurore
Plus charmant que le tien ?

L’astre des nuits s’avance en chassant les orages :
Clarisse, sois pour moi l’astre calme et vainqueur
Qui de mon front troublé dissipe les nuages
Et fait rêver mon coeur.

François-René de Chateaubriand, Poésies diverses
 

Mʀ Yᴀsɪɴ

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Colloque sentimental


Dans le vieux parc solitaire et glacé,
Deux formes ont tout à l’heure passé.

Leurs yeux sont morts et leurs lèvres sont molles,
Et l’on entend à peine leurs paroles.

Dans le vieux parc solitaire et glacé,
Deux spectres ont évoqué le passé.

- Te souvient-il de notre extase ancienne ?
- Pourquoi voulez-vous donc qu’il m’en souvienne ?

- Ton coeur bat-il toujours à mon seul nom ?
Toujours vois-tu mon âme en rêve ? - Non.

- Ah ! les beaux jours de bonheur indicible
Où nous joignons nos bouches ! - C’est possible.

- Qu’il était bleu, le ciel, et grand, l’espoir !
- L’espoir a fui, vaincu, vers le ciel noir.

Tels ils marchaient dans les avoines folles,
Et la nuit seule entendit leurs paroles.

Paul Verlaine, Fêtes galantes
 

Mʀ Yᴀsɪɴ

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Colloque sentimental


Dans le vieux parc solitaire et glacé,
Deux formes ont tout à l’heure passé.

Leurs yeux sont morts et leurs lèvres sont molles,
Et l’on entend à peine leurs paroles.

Dans le vieux parc solitaire et glacé,
Deux spectres ont évoqué le passé.

- Te souvient-il de notre extase ancienne ?
- Pourquoi voulez-vous donc qu’il m’en souvienne ?

- Ton coeur bat-il toujours à mon seul nom ?
Toujours vois-tu mon âme en rêve ? - Non.

- Ah ! les beaux jours de bonheur indicible
Où nous joignons nos bouches ! - C’est possible.

- Qu’il était bleu, le ciel, et grand, l’espoir !
- L’espoir a fui, vaincu, vers le ciel noir.

Tels ils marchaient dans les avoines folles,
Et la nuit seule entendit leurs paroles.

Paul Verlaine, Fêtes galantes


 

Mʀ Yᴀsɪɴ

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Ici, c’est un vieil homme de cent ans


Ici, c’est un vieil homme de cent ans
qui dit, selon la chair, Flandre et le sang :
souvenez-vous-en, souvenez-vous-en,
en ouvrant son coeur de ses doigts tremblants

pour montrer à tous sa vie comme un livre,
et, dans sa joie comme en des oraisons,
tout un genre humain occupé à vivre
en ses villes pies d’hommes et d’enfants.

Or à tous ici, ses pleurs et ses fêtes,
et, suivant le ciel peint à ses couleurs,
voici sa maison, ses fruits et ses fleurs,
en ses horizons d’hommes et de bêtes :

et lors ses heures d’hiver et printemps
venues en musique ainsi qu’en prières,
sous des Christs en croix, des saints, des calvaires,
puis sa foi aussi bonne en tous les temps,

pour la paix de sa vie trop à l’attache,
dans les jours, les mois, des quatre saisons,
et le réconfort de ses mains qui tâchent
ici de leur mieux et très simplement.

Max Elskamp, Enluminures
 

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L’aïeul


L’aïeul mourait froid et rigide.
Il avait quatre-vingt-dix ans.
La blancheur de son front livide
Semblait blanche sur ses draps blancs.
Il entr’ouvrit son grand oeil pâle,
Et puis il parla d’une voix
Lointaine et vague comme un râle,
Ou comme un souffle au fond des bois.

Est-ce un souvenir, est-ce un rêve ?
Aux clairs matins de grand soleil
L’arbre fermentait sous la sève,
Mon coeur battait d’un sang vermeil.
Est-ce un souvenir, est-ce un rêve ?
Comme la vie est douce et brève !
Je me souviens, je me souviens
Des jours passés, des jours anciens !
J’étais jeune ! je me souviens !

Est-ce un souvenir, est-ce un rêve ?
L’onde sent un frisson courir
A toute brise qui s’élève ;
Mon sein tremblait à tout désir.
Est-ce un souvenir, est-ce un rêve.
Ce souffle ardent qui nous soulève ?
Je me souviens, je me souviens !
Force et jeunesse ! ô joyeux biens !
L’amour ! l’amour ! je me souviens !

Est-ce un souvenir, est-ce un rêve ?
Ma poitrine est pleine du bruit
Que font les vagues sur la grève,
Ma pensée hésite et me fuit.
Est-ce un souvenir, est-ce un rêve
Que je commence ou que j’achève ?
Je me souviens, je me souviens !
On va m’étendre près des miens ;
La mort ! la mort ! je me souviens !

Guy de Maupassant, Des vers
 

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